mardi 14 décembre 2010

The Melancoly Death of Oyster Boy & Other Stories - Tim Burton

From Mummy Boy:

"The park was empty
except for a squirrel
and a birthday party for a Mexican girl."


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SUE

"To avoid a lawsuit,
we'll just call her Sue
(or "the girl who likes
to sniff lots of glue")

The reason I know
that this is the case
is when she blows her nose,
kleenex sticks to her face."

vendredi 10 décembre 2010

Moins que zéro - Bret Easton Ellis

"Bon Dieu!" crie Trent qui s'assoit sur le lit et approche le récepteur de sa bouche pour hurler dedans, "je ne veux pas de ta putain de coke merdique!". Il se tait quelques secondes, puis "Ouais, j'descends tout de suite." Il raccroche, me regarde.
"C'était qui?"
"Ma mère. Elle appelle d'en bas."
Nous descendons. La bonne est assise dans le salon avec une expression hébétée, les yeux rivés sur MTV. Trent m'apprend qu'elle déteste faire le ménage quand il y a quelqu'un à la maison. "De toute façon, elle est toujours raide défoncée. M'man se sent coupable car sa famille a été massacrée au Salvador, mais je crois qu'un de ces quatre elle va se décider à la virer."

(sentiment de panique chez le narrateur) "Je ressens de plus en plus fort le besoin d'entendre ma propre voix."

"J'étais presque sûr que ce surfer ne parlait à personne au téléphone; qu'il faisait semblant de parler, qu'il n'y avait personne à l'autre bout du fil, et je me demandais sans arrêt: vaut-il mieux faire semblant de parler que de ne pas parler du tout? "

La carte et le territoire - Michel Houellebecq

"Il ne croyait plus vraiment qu'on puisse avoir des amis, que cette relation d'amitié puisse vraiment compter dans la vie d'un homme, ni modifier sa destinée."

"Sa principale distraction quotidienne devint le visionnage de Questions pour un champion, une émission animée par Julien Lepers. Par son acharnement, son effarante capacité de travail, cet animateur initialement peu doué, un peu stupide, au visage et aux appétits de bélier, qui envisageait plutôt, à ses débuts, une carrière de chanteur de variétés, et en gardait sans doute une nostalgie secrète, était peu à peu devenu une figure incontournable du paysage médiatique français. Les gens se reconnaissaient en lui, les élèves de première année de Polytechnique comme les institutrices à la retraite du Pas-de-Calais, les bikers du Limousin comme les restaurateurs du Var, il n'était ni impressionnant ni lointain, il se dégageait de lui une image moyenne, et presque sympathique, de la France des années 2010."

"Il chercha à nouveau ses mots, c'est l'inconvénient avec les polytechniciens, ils reviennent un peu moins cher que les énarques à l'embauche mais ils mettent davantage de temps à trouver leurs mots"

"Jed devait être interrogé à de nombreuses reprises sur ce que signifiait, à ses yeux, le fait d'être un artiste. Il ne devait rien trouver de très intéressant ni de très original à dire, à l'exception d'une seule chose, qu'il devait par conséquent répéter presque à chaque interview: être artiste, à ses yeux, c'était avant tout être quelqu'un de soumis. Soumis à des messages mystérieux, imprévisibles, qu'on devait donc faute de mieux et en l'absence de toute croyance religieuse qualifier d'intuitions; messages qui n'en commandaient pas moins de manière impérieuse, catégorique, sans laisser la moindre possibilité de s'y soustraire - sauf à perdre toute notion d'intégrité et tout respect de soi-même."

"A partir du début des années 1970, avec les premiers attentats palestiniens - plus tard relayés, de manière plus spectaculaire et plus professionnelle, par ceux d'Al-Quaida - le voyage aérien était devenu une expérience infantilisante et concentrationnaire, que l'on souhaitait voir s'achever au plus vite."

"Les présidents démocrates américains, il fallait bien en convenir, ressemblaient globalement à des botoxés lubriques."

"-Vous vous intéressez aux vins?
-Ca me donne une contenance; ça fait français. Et puis il faut bien s'intéresser à quelque chose, dans la vie, je trouve que ça aide."

"Il n'avait en tout cas jamais éprouvé le besoin d'acheter un journal. A Paris, l'air ambiant est comme saturé d'information, on aperçoit qu'on le veuille ou non les titres dans les kiosques, on entend les conversations dans la queue des supermarchés. Lorsqu'il s'était rendu dans la Creuse pour l'enterrement de sa grand-mère, il s'était rendu compte de la densité atmosphérique d'information diminuait nettement à mesure que l'on s'éloignait de la capitale; et que plus généralement les choses humaines perdaient de leur importance, peu à peu tout disparaissait, hormis les plantes."


"Dans ma vie de consommateur, j'aurai connu trois produits parfaits: les chaussures Paraboot Marche, le combiné ordinateur portable - imprimante Canon Libris, la parka Camel Legend. Ces produits, je les ai aimés, passionément, j'aurais passé mavie en leur présence,rachetant régulièrement, à mesure de l'usure naturelle, des produits identiques. Une relation parfaite et fidèle s'était établie, faisant de moi un consommateur heureux, à tous points de vue, dans la vie, au moins, j'avais cela: je pouvais, à intervalles réguliers, racheter une paire de mes chaussures préférées. C'est peu, mais c'est beaucoup , surtout quand on a une vie intime assez pauvre. Eh bien cette joie simple, ne m'a pas été laissée. Mes produits favoris, au bout de quelques années, ont disparu des rayonnages, leur fabrication a purement et simplement été stoppée - et dans le cas de ma pauvre parka Camel Legend, sans doute la plus belle parka jamais fabriquée, elle n'aura vécu qu'une seule saison..." Il se mit à pleurer à grosses gouttes, se resservit un verre de vin. "C'est brutal vous savez, c'est terriblement brutal. Alors que les espèces animales les plus insignifiantes mettent des milliers d'années à disparaître, les produits manufacturés sont rayés de la surface du globe en quelques jours, il ne leur est jamais accordé de seconde chance, ils ne peuvent que subir, impuissants, le diktat irresponsable et fascistes des responsables des lignes de produits qui savent naturellement mieux que tout autre ce que veut le consommateur, qui prétendent capter une attente de nouveauté chez le consommateur, qui ne font en réalité que transformer sa vie en une quête épuisante et désespérée, une errance sans fin entre des linéraires éternellement modifiées."

"Il est impossible d'écrire un roman, lui avait dit Houellebecq la veille, pour la même raison qu'il est impossible de vivre: en raison des pesanteurs qui s'accumulent Et toutes les théories de la liberté, de Gide à Sartre, ne sont que des immoralismes conçus par descélibataires irresponsables."

"Comme il aurait été bon de visiter ensemble cet hypermarché Casino refait à neuf, de se pousser du coude en se signalant l'un à l'autre l'apparition desegments de produits inédits, ou un nouvel étiquetage nutritionnel particulièrement exhaustif et clair!..."

"Mais les approches de la mort rendent humble, il semblait désireux, ce soir, que tout se passe aussi bien que possible, il semblait surtout désireux de ne causer aucun trouble, c'était apparemment sa seule ambition sur cette terre."

"Je vais essayer une Dunhill..." Il tira quelques bouffées. "C'est bon aussi; différent des Gitanes, mais c'est bon. Je ne comprends pas pourquoi tout le monde a renoncé à fumer, d'un seul coup."

"La musique s'était calmée, des salons de réception provenait la pulsation lente d'un groove savoyard."

"La sexualité est une chose fragile, il est difficile d'y entrer, si facile d'en sortir."

"Olga l'aimait, se répéta-t-il avec une tristesse croissante en même temps qu'il réalisait que plus rien n'aurait lieu entre eux, la vie vous offre une chance parfois se dit-il mais lorsqu'on est trop lâche ou trop indécis pour la saisir la vie reprend ses cartes, il y a un moment pour faire les choses et pour entrer dans un bonheur possible, ce moment dure quelques jours, parfois quelques semaines ou même quelques mois mais il ne se produit qu'une seule fois et une seule, et si l'on veut y revenir plus tard c'est tout simplement impossible, il n'y a plus de place pour l'enthousiasme, la croyance et la foi, demeure une résignation douce, une pitié réciproque et attristée, la sensation inutile et juste que quelque chose aurait pu avoir lieu, qu'on s'est simplement montré indigne du don qui vous a été fait."

"On peut toujours, lui avait dit Houellebecq lorsqu'il avait évoqué sa carrière romanesque, prendre des notes, essayer d'aligner des phrases; mais pour se lancer dans l'écriture d'un roman il faut attendre que tout cela devienne compact, irréfutable, il faut attendre l'apparition d'un authentique noyau de nécessité. On ne décide jamais soi-même de l'écriture d'un livre, avait-il ajouté; un livre, selon lui, c'était comme un bloc de béton qui se décide à prendre, et les possibilités d'action de l'auteur se limitaient au fait d'être là, et d'attendre, dans une inaction angoissante, que le processus démarre de lui-même."

"Vous savez ce qu'affirme Comte, dit-il, que l'humanité est composée de davantage de morts que de vivants."

"Allumant France-Inter, il tomba sur une émission qui décortiquait l'actualité culturelle de la semaine; les chroniqueurs s'esclaffaient bruyamment, leurs glapissements convenus et leurs rires étaient d'une vulgarité insoutenable."

"Ce qu'il ressentait était moins du dégoût qu'une sorte de pitié générale pour la terre entière, pour l'humanité qui peut, en son sein, donner naissance à tant d'horreurs."

Prière aux anges gardiens - Franz Liszt

"Un chien c'était aussi amusant, et même beaucoup plus amusant qu'un enfant, et si elle avait envisagé un moment d'avoir un enfant c'était surtout par conformisme, un peu aussi pour faire plaisir à sa mère, mais en réalité elle n'aimait pas vraiment les enfants, elle ne les avait jamais vraiment aimés, et lui non plus n'aimait pas les enfants s'il voulait bien y réfléchir, il n'aimait pas leur égoïsme naturel et systématique, leur méconnaissanceoriginelle de la loi, leur immoralité foncière qui obligeait à une éducation épuisante et presque toujours infructueuse. Non, les enfants, en tout cas les enfants humaines, décidément il ne les aimait pas."

"Marqué sans doute par les idées en vogue dans sa génération, il avait jusque là considéré la sexualité comme une puissance positive, une source d'union qui augmentait la concorde entre les humains par les voies innocentes du plaisir partagé. Il y voyait au contraire maintenant de plus en plus souvent la lutte, le combat brutal pour la domination, l'élimination du rival et la multiplication hasardeuse des coïts sans aucune raison d'être que d'assurer une propagation maximale des gènes. Il y voyait la source de tout conflit, de tout massacre, de toute souffrance. La sexualité lui apparaissait de plus en plus comme la manifestation la plus directe du mal. "

"Je souhaite que les vers dégagent mon squelette (...) J'ai toujours entretenu d'excellentes relations avec mon squelette, et je me réjouis qu'il puisse se dégager de son carcan de chair."

"Dans l'ensemble, les jeunes ne l'intéressaient plus tellement, ses étudiants étaient d'un niveau intellectuel effroyablement bas, on pouvait même se demander, parfois, ce qui les avait poussés à entreprendre des études. La seule réponse, au fond d'elle même elle le savait, était qu'ils voulaient gagner de l'argent, le plus d'argent possible. Sa vie professionnelle pouvait en somme se résumer au fait d'enseigner des absurdités contradictoires à des crétins arrivistes, même si elle évitait de se le formuler en termes aussi nets. "

"Est-ce que c'était une vie d'être constamment sous l'emprise de la morphine?A vrai dire Jed pensait que oui, que c'était même une vie particulièrement enviable, sans soucis, sans désir ni sans crainte, sans responsabilité, proche de la vie des plantes, où lon pouvait jouir de la caresse modérée du soleil et de la brise. Il soupçonnait pourtant que son père aurait du mal à partager ce point de vue. C'était un ancien chef d'entreprise, un homme actif, ces gens là ont souvent des problèmes avec la drogue se dit-il."

"Petissaud était plus surprenant: assez beau, bronzé d'une manière que l'on devinait permanente, il souriait devant l'objectif, affichant une assurance sans complexes. Il avait au fond assez exactement le physique que lo'n associe à un chirurgien esthétique cannois habitant avenue de la Californie."

"Sur ce dont je ne peux parler, j'ai l'obligation de me taire" Wittgenstein

"Il avait quelquefois l'hypermarché pour lui tout seul - ce qui lui paraissait être une assez bonne approximation du bonheur."

"Le triomphe de la végétation est total."

lundi 29 novembre 2010

Mr Vertigo - Paul Auster

"Nous avons l'obligation de nous souvenir des morts. Telle est la loi fondamentale. Si nous ne souvenions pas d'eux, nous perdrions le droit de nous prétendre humains."

"Je vis ses yeux briller. Elle aurait donner six ans de sa vie pour nous accompagner. Elle se tourna vers le maître et lui demanda: Et bien? qu'en pensez-vous? Je viens avec vous ou non? Et lui, pompeux imbécile qu'il était, lui tapota l'épaule en disant: A votre guise ma chère. Elle eu les yeux embrumés pendant une seconde, mais tout n'était pas perdu. Avec encore un espoir d'entendre les mots qu'elle attendait, elle essaya un dernier coup: Non, c'est à vous de décider. Je ne voudrais pas être dans vos pattes. Et il répondit: Vous êtes un être libre, Marion. Ce n'est pas à moi de vous dire ce que vous devez faire. Et ce fut tout. Je vis la lumière s'éteindre dans ses yeux; son visage se ferma, elle eu une expression tendue, railleuse; et puis elle haussa les épaules. Tant pis, dit-elle. Il y a trop à faire ici de toute façon. Ensuite, avec un brave petit sourire forcé elle ajouta: Envoyez-moi une carte postale à l'occasion.
Et voilà, bonnes gens. La chance d'une vie -perdue à jamais. Le maître l'avait laissée glissée entre ses doigts et le pire, c'est que je ne suis même pas certain qu'il se rendait compte de ce qu'il avait fait."

"Si vous n'avez d'autre mobile que de vous sentir aimé, de complaire à la foule, vous ne pouvez manquer de tomber dans de mauvaises habitudes, et finalement la foule se lassera de vous. Il faut sans cesse vous mettre à l'épreuve, pousser votre talent aussi loin que possible. Vous faites ça dans votre propre intérêt mais en définitive c'est cette ardeur à vous améliorer que vous rendra le plus cher à vos admirateur. Tel est le paradoxe. Les gens commencent à deviner que vous prenez des risques pour eux la haut. Ils se sentent admis à partager le mystère, à participer, quelle qu'elle soit, à la force inconnue qui vous anime, et dès lors qu'ils réagissent ainsi, vous n'êtes plus seulement un exécutant, vous devenez une star."

"Mes mains commençaient à faire preuve d'une remarquable indépendance. Elles ne tenaient pas en place et fourmillaient d'impentience de vagabonder et d'explorer, et j'avais beau leur répéter de rester tranquilles, elles se baladaient où ça leur chantait. Je n'avais qu'à me glisser sous les draps, le soir, et elles s'obstinaient à s'envoler vers leur lieu favori, un royaume de forêt juste au sud de l'équateur. Là, elles rendaient visite à leur ami, le plus grand de tous les doigts, le tout-puissant qui règne sur l'univers de la télépathie mentale."

dimanche 31 octobre 2010

Une éducation libertine - Jean-Baptiste Del Amo

"Quimper n'était ni plus ni moins qu'un héritage. Gaspard marchait vers la Seine comme on vient à la vie, dépouillé de toute expérience. Le sentiment de vide qui l'habitait précipitait en lui Paris toute entière, appelait la ville à le remplir. Gaspard n'éprouvait aucune crainte à se sentir ainsi imputé d'une partie de son être, juste un étonnement, une reconnaissance envers rien ni personne, le désir de s'offrir à la ville, d'être habité par elle. Paris était une chance inattendue, et Gaspard sentait couver la possibilité d'un nouvel horizon."

"Il crut aimer ce sentiment de solitude, trouva curieux qu'il fût possible de pénétrer une telle condensation d'humanité dans la plus grande indifférence."

"Jamais auparavant il ne s'était fixé de but à Quimper. Il n'avait eu qu'à se laisser porter par la succession morne des jours. Des jours psalmodiés dont il ne subsistait qu'un arrière-gout d'ennui. Soudain, Paris nécessitait de sa part une ambition, une visée quotidienne."

"Il lui apparut qu'il pouvait aussi se jeter dans le fleuve; enjamber la barrière serait enfantin et seul ce geste le séparait de sa mort. En un pas, il pouvait abréger l'ineptie de son existence, offrir une solution à un problème qui semblait insoluble. Et la portée de ce geste, son accessibilité élémentaire, ouvrit en lui un gouffre de tentation."

"Il se rappela que sa personne ne présentait aucun intérêt. Ce mépris interpela Gaspard et, venant d'un homme comme le Compte de V., provoquan en lui une ardeur à plaire, un désir de considération doublé d'une excitation occulte qui le déstabilisa. Il espéra en apprendre plus sur cet homme, s'aperçut être suspendu à l'attente de ses mots, guettant chacune de ses phrases à la recherche d'une résonance, mais aussi le moindre de ses gestes qui dévoilerait un peu de ce mystère. Cette autorité que la présence du Comte établissait d'emblée comme un droit sur l'atelier relevait du vertige."

samedi 30 octobre 2010

Antigone - Jean Anouilh

Antigone (à Ismène): "Comme cela doit être facile de ne pas penser de bêtises avec toutes ces belles mèches lisses et bien ordonnées autour de la tête."

Antigone (à Hémon): "Et serre-moi. Plus fort que tu ne m'as jamais serrée. Que toute ta force s'imprime dans moi."

Le choeur: "Et voilà. Maintenant le ressort est bandé. Cela n'a plus qu'à se dérouler tout seul. C'est cela qui est commode dans la tragédie. On donne le petit coup de pouce, pour que cela démarre, rien, un regard pendant une seconde à une fille qui passe et lève les bras dans la rue, une envie d'honneur un beau matin, au réveil, comme de quelque chose qui se mange, une question de trop qu'on se pose un soir... C'est tout. Après, on n'a plus qu'à laisser faire. On est tranquille. Cela roule tout seul. C'est minutieux, bien huilé depuis toujours. La mort, la trahison, le déserspoir sont là, tout prêts, et les éclats, et les orages, et les silences: le silence quand le bras du bourreau se lève à la fin, le silence au commencement quand les deux amants sont nus l'un en face de l'autre pour la première fois, sans oser bouger tout de suite, dans la chambre sombre, le silence quand les cris de la foule éclatent autour du vainqueur - et dont on dirait un film dont le son s'est enrayé, toutes ces bouches ouvertes dont il ne sort rien, toute cette clameur qui n'est qu'une image, et le vainqueur, déjà vaincu, seul au milieu de son silence...
C'est propre la tragédie. C'est reposant, c'est sûr... Dans le drame, avec ses traitres, avec ses méchants acharnés, cette innocence persécutée, ces vengueurs, ces lueur d'espoir, cela devient épouvantable de mourir, comme un accident. On aurait peut-être pu se sauver, le bon jeune homme aurait peut-être pu arriver à temps avec les gendarmes. Dans la tragédie on est tranquille. D'abord on est entre soi. On est tous innocents en somme! Ce n'est pas parce qu'il y en a un qui tue et l'autre qui est tué. C'est une question de distribution. Et puis, surtout, c'est reposant, la tragédie, parce qu'on sait qu'il n'y a pas d'espoir, le sale espoir; qu'on est pris, qu'on est enfin pris comme des rats,avec tout le ciel sur son dos, et qu'on n'a plus qu'à crier, - pas à gémir, non, pas à se plaindre, - à gueuler à pleine voix ce qu'on avait à dire, qu'on avait jamais dit et qu'on ne savait peut-être même pas encore. Et pour rien: pour se le dire à soi, pour l'apprendre, soi. Dans le drame, on se débat parce qu'on espère en sortir. C'est ignoble, c'est utilitaire. Là, c'est gratuit. C'est pour les rois. Et il n'y a plus rien à tenter, enfin!

Créon (à Antigone): "La loi est d'abord faite pour toi, Antigone, la loi est d'abord faite pour les filles des rois."

Créon (à Antigone): "Marie-toi vite, antigone, sois heureuse. La vie n'est pas ce que tu crois. C'est une eau que les jeunes gens laissent couler sans le savoir, entre leurs doigts ouverts. Ferme tes mains, vite. Retiens-la. Tu verras, cela deviendra une petite chose dure et simple qu'on grignote, assis au soleil. Ils te diront tous les contraire parce qu'ils ont besoin de ta force et de ton élan. Ne les écoute pas. (...) Tu l'apprendras toi aussi, trop tard, la vie c'est un livre qu'on aime, c'est un enfant qui joue à vos pieds, un outil qu'on tient bien dans sa main, un banc pour se reposer le soir devant sa maison. Tu vas me mépriser encore, mais de découvrir cela, tu verras, c'est la consolation de vieillir, la vie, ce n'est peut-être tout de même que le bonheur."

Antigone (à Créon): "On dirait des chiens qui lèchent tout ce qu'ils trouvent. Et cette petite chance pour tous les jours, si on n'est pas trop exigeant. Moi, je veux tout, tout de suite -et que ce soit entier - ou alors je refuse! Je ne veux pas être modeste moi, et me contenter d'un petit morceau si j'ai été bien sage. Je veux être sûre de tout aujourd'hui et que cela soit aussi beau que qaund j'étais petite -ou mourir."

Le tigre blanc - Aravind Adiga

"Dès l'instant où vous reconnaissez ce qui est beau dans le monde, vous cessez d'être un esclave. Si vous enseignez l'art de la peinture à tous les garçons pauvres de l'Inde, ce sera la fin des riches."

"Cet après-midi, en roulant sur M.G. Road, l'avenue chic de Bangalore où s'aligne magasins américains et sociétés technologiques, j'ai vu les employés de Yahoo placer une nouvelle enseigne devant leur siège:
QUELLE EST LA TAILLE DE VOTRE AMBITION?
Pour montrer la mesure de la mienne, j'ai lâcher le volant et écarter largement les bras.
Grande comme une bite d'éléphant, connard!!"

mardi 7 septembre 2010

Bech voyage - Updike

"Khroutchtchev, destitué depuis peu, avait laissé derrière lui une atmosphère vaguement clownesque de cordialité, de brusquerie saccadée, de moyens d'action surprenants et de possibilités obliques. Il semblait n'y avoir aucun obstacle insurmontable à ce que la Russie et l'Amérique, ces deux aimables géants paranoïaques, pussent se partager avec bonheur un globe si vaste et si bleu."

"Je pense que les juifs ont le sentiment que l'endroit où ils résident, quel qu'il soit, est assez paradisiaque, uniquement parce qu'eux s'y trouvent."

"La férocité retenait tout particulièrement l'attention de Bech car, parmi les multiples aspects de la condition humaine qu'il avait pour métier d'imaginer, l'appétit de meurtre était le plus difficile à concevoir. Bien qu'il fût capable de ressentir de l'irritation et même de la vindicte, la cruauté acharnée ne figurait pas au bilan de ses émotions."

"Bech l'observa pour découvrir en lui quelque signe de satisfaction, quelque chose qui trahît une certaine malveillance, mais ne vit rien. Ses yeux étaient des taches vivantes; sa bouche était celle d'un écolier qui, n'étant ni intelligent ni fort, a fait de son insignifiance même un trait de caractère qui lui assure quelque crédit.Il jetta vers Bech un coup d'oeil parfaitement inexpressif."

"Il reconnut le visage de tout ce que ce monde contient d'ignoble, d'aride, de stupide et d'inéluctable."

"Il décida qu'elle voulait être sarcastique."

"Les hommes qui voyagent seuls sont sujets à une sorte de vertige romantique."

"l'inconsciente insolence de leur corps"

"Les faits sont un continuel appauvrissement du possible."

"Il leur dit, il leur dit sans pudeur, d'une voix qui le surpris lui-même par sa fermeté et son sérieux évident. (...) Bech s'excusa de leur dire tout cela. Sa voix avait un goût rassis dans sa bouche; il ressentait une secrète ébriété et une secrète culpabilité, car il s'était arrangé pour donner un air de grandeur à son échec, pour en parler comme d'une entreprise d'une impossible noblesse et d'une complexité donquichottesque, alors qu'au fond, il soupçonnait que c'était simplement la paresse qui en était la cause."

"Ces êtres beaux, divertissants, prospères quoique sans profession qui remplissaient les interstices entre les célébrités"

"Pourquoi veux-tu essayer toutes ces drogues? C'est si insultant pour la terre entière et pour moi."

"Il lui apparut que le vide originel aurait dû demeurer intact, que tout ce désordre de la matière, de la vie et, pis encore, de la conscience, aurait dû être épargné."

"Bizarre à quel point le fait d'essayer de parler sérieusement lui donnait la sensation d'être sale."

"une tranche de nuit ardoise"

"N'importe quelle Américaine de son âge gardait tout l'hiver le comique fantôme d'un bikini d'été qui faisait ressortir avec une netteté de diagramme ses zones érogènes."

"Il s'était précipité à travers sa vie comme on avale sans le mâcher un repas qui vous laisse une sensation d'indigestion."

"le caractère défensif de la loquacité désinvolte de Bech"

"Tous avaient atteint le havre de l'oeuvre durable et se trouvaient dispensés de l'irritant souci de la croissance et de son jumeau: le déclin."

jeudi 26 août 2010

Andromaque - Jean Racine

Extraits de la PREFACE:

"Voilà, sans doute, la moindre de vos excellentes qualités. Mais, c'est la seule dont j'ai pu parler avec quelque connaissance: les autres sont trop élevées au-dessus de moi. Je n'en puis parler sans les rabaisser par la faiblesse de mes pensées, et sans sortir de la profonde vénération avec laquelle je suis, Madame, le très humble, très obéissant et très fidèle serviteur."

"Et Aristote, bien éloigné de nous demander des héros parfaits, veut au contraire que les personnages tragiques, c'est-à-dire ceux dont le malheur fait la catastrophe de la tragédie, ne soient ni tout à fait bons ni tout à fait méchants. Il ne veut pas qu'ils soient extrêmement bons, parce que la punition d'un homme de bien exciterait plutôt l'indignation que la pitié du spectateur; ni qu'il soient méchants avec excès, parce qu'on n'a point pitié d'un scélérat. Il faut donc qu'ils aient une bonté médiocre, c'est-à-dire une vertu capable de faiblesse, et qu'ils tombent dans le malheur par quelque faute qui les fasse plaindre sans les faire détester."

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REPLIQUES DE PYRRHUS

"Seigneur, tant de prudence entraîne trop de soin.
Je ne sais point prévoir les malheurs de si loin."


"Hé quoi! votre courroux n'a-t-il pas eu son cours?
Peut-on haïr sans cesse? et punit-on toujours ?"


"Hé bien, madame, hé bien, il faut vous obéir:
Il faut vous oublier, ou plutôt vous haïr.
Oui, mes voeux ont trop loin poussé leur violence
Pour ne plus s'arrêter que dans l'indifférence;
Songez-y bien: il faut désormais que mon coeur,
S'il n'aime avec transport, haïsse avec fureur."


"Après cela, Madame, éclatez contre un traître,
Qui l'est avec douleur, et qui pourtant veut l'être.
Pour moi, loin de contraindre un si juste courroux,
Il me soulagera peut-être autant que vous.
Donnez-moi tous les noms destinés aux parjures:
Je crains votre silence, et non pas vos injures;
Et mon coeur soulevant mille secret témoins,
M'en dira d'autant plus que vous m'en dirai moins."

REPLIQUES D'HERMIONE

"Quelle honte pour moi, quel triomphe pour lui,
De voir mon infortune égaler son ennui!"

"J'ai cru que tôt ou tard, à ton devoir rendu,
Tu me rapporterais un coeur qui m'était dû.
Je t'aimais inconstant; qu'aurais-je fait fidèle?
Et même en ce moment où ta bouche cruelle
Vient si tranquillement m'annoncer le trépas,
Ingrat, je doute encore si je ne t'aime pas.
Mais, seigneur, s'il le faut, si le ciel en colère
Reserve à d'autres yeux la gloire de vous plaire,
Achevez votre hymen, j'y consens; mais du moins
Ne forcez pas mes yeux d'en être les témoins."

REPLIQUES D'ORESTE

"Non, non; je le connais, mon désespoir le flatte:
Sans moi, sans mon amour, il dédaignait l'ingrate;
Sas charmes jusque-là n'avaient pu le toucher:
Le cruel ne la prend que pour me l'arracher."

"Hé bien! Filles d'enfers, vos mains sont-elles prêtes?
Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes?
A qui destinez-vous l'appareil qui vous suit?
Venez-vous m'enlevez dans l'éternelle nuit?
Venez, à vos fureurs, Oreste s'abandonne.
Mais non, retirez-vous, laissez faire Hermione:
L'ingrate mieux que vous saura me déchirer;
Et je lui porte enfin mon coeur à dévorer."

samedi 21 août 2010

De l'art d'ennuyer en racontant ses voyages - Matthias Debureaux

"Les voyages, ça sert surtout à embêter les autres une fois qu'on est revenu." Sacha Guitry

"Ceux qui ont fait le tour du monde peuvent faire durer leur conversation un quart d'heure de plus." Jules Renard

"Chiant qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage."

"Mais qu'est-ce qu'un voyageur? "Un homme qui s'en va chercher un bout de conversation au bout du monde" répond Jules Barbey d'Aurevilly. Dès 1890, un manuel britannique de bonnes manières met en garde le gentleman: "Si vous avez voyagé, ne l'étalez pas dans votre conversation à la première occasion. N'importe qui, avec de l'argent et du temps libre, peut voyager."

"Quand quelqu'un se rend compte que sa vie ne vaut rien, soit il se suicide, soit il voyage." Edward Dahlberg

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"Rhéabilitez le mythe du bon sauvage. Ne tarissez pas d'éloges dur la gentillesse de la population locale. Une gentillesse qui se voit dans le regard. Des êtres terriblement attachants, pleins de joie de vivre, agréables et disponibles pour les discussions, très dignes dans leur misère et qui ont un grand nombre de leçons à donner à nos sociétés dites "développées". Osez les métaphores: "Aux Philippines, les gens ont des papillons de bonheur sur l'épaule." Puis confessez que c'est quand même autre chose que la tête des gens dans le métro."

Offrez quelques clés pour mieux appréhender la connaissance des peuples: les Italiens adorent les enfants, les Cubains ont le sens de la fête ou les Russes ont une bonne descente."

"Comme dans le journal d'Andy Warhol, déclarez le montant de chaque dépense. Détaillez les prix dérisoires (en doll' pour faire cool) de vos repas, coupes de cheveux, nuits d'hotel ou de vos souvenirs "coup de coeur" telle cette paire d'espadrilles guatémaltèques acquise pour le prix d'une glace. Cela prouvera votre aptitude à vivre comme les locaux et votre remarquable sens des affaires."

"Prétendez, en bon déffricheur d'espaces, avoir lancé la vogue d'un pays. Revendiquez sa découverte bien avant l'arrivée des hordes de touristes. Concluez en regrettant que vous ne le reconnaissez pas aujourd'hui et n'y retrouvez pas l'énergie et la fraîcheur d'antan."

"Soyez vif. Entraînez-vous à résumer tout à trac une ville en trois images. Ex: "New York pour moi? Tour de Babel, jogging, gospel." Puis brodez autour de mots-clés comme "cosmopolitisme", "mosaïque" ou "brassage ethnique". Des termes supperposables à la cuisine, la musique, la culture ou la population."

"Péchez par omission afin de ne pas décevoir. Oubliez de mentionner le présence de distributeurs de billets sur l'île de Paques."

"Imitez la rhétorique du guide du Routard. Fleurissez votre compte rendu de "rien que ça!", "il fallait y penser!", "pas folle la guêpe", "véridique!"..."

vendredi 20 août 2010

Les Martagons - Dominique Noguez

"Elle eut même de ces phrases qu'on retient, qu'on se murmure seul, qui font espérer."

"On revint sur mai 68.
-Une sublime libération des moeurs bétonnée en ordre moral stalinien, confisquée par les cloportes de la langue de bois, par les brillants autodécervelés du maoïsme normalien, dit Vlad".

"Et tandis que Baba faisait signe à la serveuse de ramener une bouteille, on partit dans l'une de ces bonnes vieilles discussions sur Dieu sans lesquelles il n'est pas de dîner entre amis digne de ce nom. Dieu est mauvais, c'est le diable, soutint Baba. Faire le bien, c'est se révolter contre lui. Ainsi la vie humaine a un sens: en luttant contre le mal, petit à petit, bouter Dieu hors de sa création et arriver à un monde bon."

"-Qu'as-tu, cher, contre les tags? Fit Vlad. Ne sont-ce point les hiéroglyphes de la modernité urbaine, la pathétique signature des anonymes et des déclassés, l'appel, le cri plastique de ceux que personne n'écoute?
-On n'entend qu'eux! dit Baba. Et "plastique", j'en doute. Il faut demander à Julien. Il paraît qu'on en a exposé dans des galeries. Ce n'était certainement pas les gribouillis qu'on voit dans le métro! La plupart, en tout cas, s'ils appellent, c'est plutôt comme les chiards qui barbouillent les murs de leur caca pour attirer l'attention de papa-maman. Ils appellent surtout la fessée.
Julien, interpelé, répondit à son tour.
-A quelques fresques près, qui peuvent intéresser les collectionneurs de graffitis cocasses ou d'ornementations naïves, ce qu'on voit aujourd'hui sur les murs, les plans d'autobus ou les sièges de trains de banlieue a à peu près autant d'intérêt artistique que les crottes de pigeon sur les statues ou les troitoirs: pauvres, désespérément répétitifs et surtout copies serviles de ce qui s'est fait ailleurs il y a longtemps. Aucune créativité là-dedans. Sinon dans les efforts de deux ou trois critiques d'art démagos et retardataires pour faire prendre, il y a quelques années, ces vessies pour des lanternes.
-Moi, ce qui me frappe, dit Fleur, c'est à quel point ces gribouillis prétendument subversifs font bon ménage avec le "libéralisme" le plus sauvage. Vous remarquerez que les courageux graffiteurs anonymes ne s'en prennent à peu près jamais aux publicités commerciales, aux fastfoods, aux temples de la marchandise que sont les Virgin ou autres CD Book Hyperstore et presque toujours, sinon exclusivement, à tout ce qui peut paraître relever du domaine public - université, monuments, métro, etc. Dans cette idéologie de la privatisation à outrance, tout bien collectif est réputé inférieur et saccageable à merci."

"Le ciel, ce soir, est clair comme un désastre,
Liquide et vide au-dessus des maisons,
Pas un oiseau, tout est plat, pas un astre
,
Tu n'es pas là, rien n'a plus de raison."

"D'avant-garde, beaucoup le sont, mais au sens où le pet est l'avant-garde de la colique."

"Il faut être bien naïf pour croire au bien, même à petite dose. N'y aurait-il que ces deux scandales, dont la découverte rend, hélas! adulte: la non-réciprocité de l'amour et l'immortalité de l'Etat."

mardi 17 août 2010

Camping Atlantic - Ariel Kenig

"Je la console vaguement, je la remercie pour cet après-midi et devant le panneau de la réception, je lui souhaite bon courage, longue vie, santé et tout ce que l'on souhaite si facilement à ceux que l'on ne reverra pas."

"Le temps des mouchards est calibré. Un temps si bien cadencé qu'aucun d'eux, jamais, et jusqu'à sa mort, ne s'imaginerait sur un autre rythme. Ca rape, ça colle, ça pleure, ça ne bronche pas. La vie de mouchard pauvre est bien la pire de toute. Jamais vous ne fréquenterez les enfants d'un autre âge et jamais vous ne vivrez la nuit, serez propre, beau et apprêté, jamais vous ne vous branlerez sans devenir sourd, jamais vous ne boirez de crus classés. Vous n'échapperez pas au foot, ça rassure toujours la virilité d'un père, et vous n'aimerez votre famille autrement que sans imaginer votre avenir en son sein, sans silence et sans tendresse. Vous ne deviendrez jamais autre chose que pompier, facteur, instituteur ou vétérinaire.
Vous, peut-être, oui, vous, n'avez pas grandi dans un camping et m'affirmerez qu'il est toujours concevable de s'épanouir en discutant, en lisant, en errant et surtout, en désirant les hivers, les étés à venir dans les yeux de ceux qui, maîtres ou sages, savent en parler. Mais au milieu d'un camping pris d'assaut, il n'est pas rare de se dire qu'il n'y a personne."

"Ma grand-mère disait C'est fou, quand on part en vacances, comme ce qui nous appartient nous appartient plus encore."

"Y'a bien des vieux, quelque part, qui portent en eux de la douceur. Un truc désirable, quoi. Dans le fond, je trouve ça très beau, de vieillir. Quand t'es pas dans l'aigreur, que tu fais des rides à ta manière."

"La stratégie du plouc, c'est de "rester naturel", de revendiquer "son choix parce qu'il pense comme ça. "Etre lui-même." Etre mieux que lui-même, ça, non, c'est abject. Ca le fatigue d'avance, le progrès de soi - autant que ça me saoule de débarrasser la table quand j'ai préparé la sauce salade. Il préfère la facilité du "contre". Contre l'argent, la drogue et les Allemands. Contre le sexe et la mort."

vendredi 13 août 2010

Montserrat - Emmnuel Roblès

REPLIQUES DE MONTSERRAT:

"Je suis avec vous contre les miens, contre leur oppression, leurs violences, contre cette manière terrifiante qu'ils ont de nier les hommes... Vous le voyez bien que, pour eux, la vie humaine, la dignité humaine ne comptent pas !"

"Bolivar ne s'appartient plus à présent. Il appartient tout entier à la cause qu'il a lui-même fait surgir par dessus des milliers de morts."

"Même si je n'avais pas foi dans la promesse du Christ, je ferais mien le combat de Bolivar! Il s'agit de rendre à des milliers de misérables leur dignité de créature de Dieu."

"Tu es loin de Dieu, Izquierdo. Un jour, tu auras soif de Dieu! Tu le chercheras! Mais il y aura, entre toi et lui, cette mer de sang, ce fleuve de larmes! Tu mourras désespéré! Tu auras une agonie atroce!"


REPLIQUES D'IZQUIERDO:

"Je crains fort que ces pauvres gens ne meurent contre leur gré pour la Liberté, la Justice, la Dignité humaine. Les grands principes sont comme les grands cataclysmes. Ils font toujours une effroyable consommation de créatures!"

"On aimerait écraser à coups de talon cette tête où les mots s'enfoncent comme des balles dans la chair morte."

"Que veux-tu? Il y a des gens sans orgueil qui se résignent à végéter sous notre domination plutôt que de recevoir douze balles dans la poitrine. Ils préfèrent vivre avilis sous notre botte que mourir glorieusement pour la Liberté..."

"J'ai attendu en vain un signe, une présence en moi quelque chose qui m'aurait révélé que nous ne sommes pas seuls, condamnés avec notre propre chair."


REPLIQUES DU MOINE:

"Garde donc en toi les sentiments qui étaient ceux du Christ aux mains de ses bourreaux! Ainsi tu seras sauvé! Car tu sais que le ciel et la terre passeront, que tout ce qui nous entoure sera poussière un jour, mais que seule la gloire de Dieu est éternelle!"

jeudi 12 août 2010

Mammifères - Pierre Mérot

"Chaque être a visiblement une tendance à émettre des jugements sur les autres, généralement négatifs, et à raisonner en termes de hiérarchie. Le but de celui qui raisonne ainsi est bien évidemment de dominer les autres, ou de croire qu'il les domine."

"Peut-être jugera-t-on que l'oncle n'est que vinaigre, qu'il est de mauvaise foi ou qu'il manque de nuances. Certes... mais il se considère aussi comme une espèce de Parque bienveillante et rebelle qui veille lointainement sur le destin des siens, avec d'autant plus de complicité qu'il est issu du même moule risible, douloureux, et terriblement humain."

"L'once n'aime pas trop la prostitution, non pas par rigidité morale mais par manque d'argent."

"Les Suisses racontent souvent des histoires de cheminée quand il sont entre eux."

"Cette première expérience de la vie active grava dans sa chair la certitude qu'il était mortel."

"Les éditions Ubu sont nées dans les années 1970. Comme d'autres petites structures fondées à cette époque, elles veulent se démarquer des grandes maisons, elles revendiquent leur différence. Chez Ubu, on différait énormément. D'ailleurs, dans son bureau, le père Ubu chantait à tut-tête: Nous différons ! Nous différons tous nos paiements!"

"Tous deux se sentaient traqués dans une forêt sociale, obligés de changer de cache régulièrement. Juste avant qu'on ne s'apperçût de leur inappétence."

"Qu'est-ce qu'un chef d'entreprise? C'est quelqu'un qui veut vous faire travailler douze heure par jour pour le prix de six. Il critique l'Etat et l'Administration, tout en mendiant des subventions. L'unique raison d'être de sa fabrique de bidets et de faire vivre dans l'opulence une famille d'imbéciles. Les enfants ont chacun leur voiture, ratent trois fois leur bac, séjournent longuement aux Etats-Unis, et vous regardent de haut."

"Qu'est-ce qu'une démocratie? c'est un système politique dans lequel des citoyens informés intensément, profondément lucides et parfaitement désintéressés, élisent comme représentant un homme qui gagne en un an ce que la plupart d'entre eux n'auront pas en une vie. De plus, c'est généralement un escroc qui se soustrait à la justice."

"Malheureusement, beaucoup d'hommes ont deux couilles: l'une pour leur mère, l'autre pour leur femme, et aucune pour eux."

"Les plus grandes putes sont les enseignants qui font bloc autour du principal. La plupart ont entre 25 et 30 ans. Ils viennent du "triangle pédagogique". Ce triangle vérolé produit des ministres démagogues, des inspecteurs lâches et arrivistes, des pédagogues dogmatiques, des enseignants incultes, des cyniques, des imbéciles... Quelles sont les méthodes des putes? Leurs élèves apprennent des choses complexes. En troisième, ils recopient des listes de vocabulaire ou colorient des figures géométriques sur de magnifiques cahiers. Les putes adorent les cahiers. Les élèves sont prévenus: un cahier mal tenu obtiendra nécessairement la note de douze sur vingt. Les putes sont aussi friandes de débats sur le foot, sur la violence, sur le Val-d'Oise, sur tout ce qu'on veut. C'est important l'oral. Les élèves réussissent bien à l'oral. Pas moins de quatorze à l'oral. Les moyennes chez les putes sont donc excellentes. (...) "Prenons le cas de Fatima", explique Monsieur Pute. Fatima a treize ans et est en sixième. Certes, elle est analphabète. Mais sont cahier est assez bien tenu. Et à l'oral, elle est très vivante. Elle a 12 avec Monsieur Pute et 1 avec Monsieur Très Méchant. Elle aime beaucoup Monsieur Pute qui a su reconnaître ses grandes capacités à l'oral. C'est vrai qu'elle parle tout le temps avec ses voisins. Elle est très mondaine Fatima. Comme elle ne comprend rien, il faut bien qu'elle s'occupe. L'oncle l'aime quand même bien la grosse Fatima. Elle a bon coeur. Elle apprend très activement son futur métier: elle est toujours volontaire pour ramasser les papier par terre, nettoyer les tables, ou ranger les chaises à la fin de la journée."

mercredi 11 août 2010

Ce n'est rien qu'un président qui nous fait perdre notre temps - Thomas Legrand

"Le sarkozysme est une construction de circonstance et d'opportunité qui se donne des airs de doctrine et qui ne résiste pas à la réalité française, à ses équilibres chèrement et longuement acquis. Ce qui était présenté (par le sarkozysme) comme un "tabou" ou un "conservatisme" n'était rien d'autre qu'un consensus, un élément constitutif de la tradition républicaine à laquelle les Français sont attachés, consciemment ou non."

"La France se remettra du sarkozysme et de l'antisarkozysme. Elle les digère déjà. Le sarkozysme, ce n'est pas une idée, c'est une ambition. Il ne faut pas écrire "sarkosIsme" avec un "I" mais "sarkozYsme" avec un "Y". SarkozIsme voudrait dire qu'il y a une pensée, un corps de doctrine, une vision pour l'avenir du pays. Le suffixe "isme" se mérite. "Ysme" suggère que le sarkozYsme n'est finalement rien d'autre que l'accumulation des faits et gestes et dires de Nicolas Sarkozy. Son pendant, l'antisarkozysme: les faits et gestes et dires de tous ceux qui pensent que le sarkozysme est dangereux. Ceux-là ne font pas la différence entre un I et un Y !"

"Il fallait ménager le flou. Le flou créateur de malentendus. Les malentendus créateurs de polémiques. La polémique créatrice de clivages. Les clivages qui génèrent le conflit. Le conflit qui, seul, peut amener une victoire politique lisible. Toujours la même logique de l'opacité et de l'affrontement."

"Les commentateurs de la vie politique se trouvent dans la situation de leurs confrères sportifs devant un match de foot au cours duquel le joueur vedette de l'équipe de France monopoliserait le ballon pour s'épuiser en figures incroyables. Il faudrait s'extasier, applaudir la dextérité de l'artiste, la précision du jongleur ou bien dénoncer la frime, le jeu perso et l'accaparement. Puis constater à la mi-temps qu'il n'y a toujours pas de but marqué. Rien."

"A mi-mandat, on attend la grande réforme. Au-delà d'une parole effrénée emprunte de volontarisme, on cherche LA rupture, LA modernité, LA gouvernance modeste et transparente. Que sont devenus les marqueurs idéologiques du sarkozysme, le "travailler plus pour gagner plus" (impraticable), la "discrimination positive" (oubliée), la "réforme de la Françafrique" (même pas essayée), l'"immigration choisie" (infaisable), la "politique de civilisation" (disparue), le "Grand Paris" (une ligne de métro)? Ce n'est rien, Nicolas Sarkozy ne représente donc pas un danger pour la République. Il n'est qu'un Président banalement de droite, un pragmatique opportuniste dont le ton péremptoire n'a d'égal que sa capacité au revirement. Une perte de temps pour la modernisation de la vie politique française. Un Jacques Chirac en sueur, le dernier Président du XXeme siècle."

mardi 10 août 2010

Les Exclus - Elfriede Jelinek

"Quand tu opposes une telle résistance à mes incursions dans le royaume de la photographie, j'ai envie de te défoncer le crâne."

"Quand Anna voit quelque chose de blanc, elle a aussitôt envie d'y faire une tache. Anna est sans cesse obsédée par des choses désagréables qui accèdent à son cerveau par une voie à sens unique. La barrière mobile se lève toujours dans la même direction. Ca rentre mais ça ne ressort jamais, toutes ces choses désagréables se bousculent dedans, et la sortie de secours est barricadée."

"Merde pour la classe ouvrière et vive le rock'n roll."

"Ce n'est pas pour l'école qu'on apprend mais pour la vie, plus on apprend, plus on vit."

"En tous deux règne une confusion des sentiments caractéristique des jeunes gens qui ne se sont pas encore trouvés eux-mêmes et n'ont pas encore trouvé de place dans l'économie moderne."

lundi 9 août 2010

Les pieds dans l'eau - Benoît Duteurtre

"J'aime ces jolies demeures et ces campagnes d'autrefois où je peux m'inventer une élégante bohème au parfum périmé."

Sur les années 1960-1970:
"Babas cool, junkies, trotskistes, maoïstes, anarchistes... Toutes ces voies se voulaient alors prometteuses. En liquidant le monde ancien, nous marchions sûrs de nous, vers une société meilleure, avant que la modernité ne révèle sa noire litanie de chômage, pauvreté, sida, désastres écologiques, décomposition sociale, liquidation du bien public. Nous rêvions d'un échange foisonnant, d'une humanité sans frontières, avant que le rêve ne s'accomplisse, d'une autre façon, , dans le triomphe du marché universel et du tourisme de masse. Nous pensions bâtir un futur enchanté, quand nous nous contentions de nettoyer le vieux terrain national et religieux, comme pour faciliter l'avènement de la nouvelle industrie culturelle mondiale et de ses produits formatés."

"Mais le rêve d'amour avait fait place au harcèlement mutuel qui occupe souvent les vieux couples."

"cette arrogance des gamins privilégiés qui ne sont pas méchants mais semblent nés pour le pouvoir et entendent rester les meilleurs en tout"

"Serais-je ce pauvre type cultivant l'idée du déclin pour se persuader qu'il possède un passé?"

"D'un côté, fidèle à l'enseignement maternel, je partageais cette aspiration antibourgeoise, évangélique, égalitariste; mais simultanément, j'éprouvais une furieuse envie de goûter à tous les plaisirs de l'existence. Dès le début de mes études, je me suis efforcé de vivre comme le rentier que je n'étais pas. Sans en avoir les moyens (j'étais toujours fauché), j'ai commencé à prendre des taxis, à voyager en première classe, à dépenser mon argent pour le superflu plutôt que pour le nécessaire. Je voulais connaître le vrai confort, fréquenter les beaux décors, accéder à tous les milieux sans restriction morale. D'un côté, je galérais, je pianotais, j'écrivais, je noctambulisais et j'aimais cette vie périlleuse. De l'autre, j'aimer me faire inviter chez des gens haut placés. Au fil de la conversation, je glissais parfois une allusion à mon ancêtre président, comme pour dire: "Vous ne m'intimidez pas"; et ce détail biographique plaisait d'ailleurs beaucoup à mes hôtes, comme une carte du club. On aurait dit que j'avais toujours vécu dans ces salons confortables, ces jardins d'hiver, ces appartements de décorateurs.
Ainsi s'est précisé le mélange qui fait de moi un snob (j'aime être l'intime des stars, j'adore les belles demeures et les privilèges) et un garçon charmant, aussi heureux de prendre l'apéritif avec sa concierge. Obsédé par les apparences futiles (j'attache une extrême importance à ma place au théâtre. Suis-je dans la meilleure loge? au rang d'honneur?), je vois l'absurdité de mon propre snobisme. Ambitieux (j'aime être admiré, avoir du succès), j'ai horreur de parler de moi, autant que de me voir à la télévision. Egoïste (je ne pense qu'à mon plaisir, le sort de quiconque m'est indifférent), je suis sincèrement occupé des autres (d'un naturel attentif, je ne m'ennuie avec personne, j'aime questionner mon interlocuteur et le comprendre).
Sans ces contradictions, je me serais contenté de vouloir tout rattraper comme un gandin. Inscrit dans un club de golf, je m'habillerais de vêtements anglais, j'aurais une voiture décapotable et une villa à Etretat. Ma combinaison personnelle est un peu différente: elle sait que l'ordre social est plein de hasard, qu'aucune position, aucun titre n'a de valeur particulière; que les conventions étaient pesantes, qu'elles ont perdu leur sens à tout jamais... mais que cette perte fait aussi leur charme irrésistible."

"Selon cette scinece sociale oubliée, c'est la convention qui rend l'existence intéressante comme un morceau de théâtre. Le fait de porter des bijoux pour déjeuner, de se montrer aimable et souriant, d'être attentif aux autres et de s'exprimer clairement, tout cela donne une forme délectable au temps qui passe. Aller au musée, se promener dans les jardins publics, se retrouver à la messe le dimanche, prendre le thé, parler du dernier film ou du dernier roman: autant de mornes habitudes qui nous rappellent l'équilibre savant d'un ancien art de vivre. Même la fameuse hypocrisie bourgeoise devient une qualité quand elle consiste à masquer ses tourments, à laisser la part d'ombre dans l'ombre, plutôt que de donner le champ libre à la sincérité et aux conflits. Voilà toute une esthétique du quotidien que nous ne connaissons plus guère, depuis que nos vertus s'appellent franchise et naturel. Pourtant, le plus cruel de tableau de moeurs, peint par Feydeau ou Guitry, comporte cette sophistication rejouissante, appliquée à l'art de tromper sa femme ou son mari; comme si le savoir-vivre était là pour atténuer la brutalité de la vérité et du crime. En ce sens, le mensonge bourgeois marque un point admirable de la civilisation."

"Il m'a fallu des années pour comprendre que cet exécrable monde bourgeois avait curieusement engendré la plupart des artistes que j'aimais. Esprits libres, inventeurs, fantaisistes, presque tous provenaient de ce milieu parisien ou provincial parfois étriqué: Beaudelaire, Flaubert, Mallarmé, Verlaine, Valéry, Proust, Monet, Renoir, Degas, Cézanne, Matisse, Signac, Vuillard, Fauré, Debussy, Ravel (...) Rassemblés en groupes loufoques et provocateurs, les étudiants anticonformistes de la IIIeme République formaient eux-aussi une coalition d'enfants de bourgeois dressés contre leur classe, pour ce qu'elle avait de conventionnel et d'obtus (...) Un siècle plus tard, mon discours antibourgeois stéréotypé restait lui-même une manifestation de cet esprit bourgeois, dont l'une des qualités principales est d'avoir inventé la détestation du bourgeois.
Je ne connais pas d'autre exemple d'une classe sociale dont l'une des activités principales aura consisté dans cette impitoyable critique de soi. L'aristocrate n'a jamais montré tant de doute sur lui-même; et le monde ouvrier ou paysan exalte plus volontiers ses vertus, forgées dans la sueur et l'humiliation. Au contraire, la bourgeoisie a donné jour aux analyses les plus aigües du style bourgeois, du despotisme bourgeois ou de la morale bourgeoise. Elle a engendré les théories les plus hostiles à son propre pouvoir (chez le bourgeois Marx) comme à sa vertu sans taches (chez le bourgeois Freud); et ses enfants les plus brillants ont combattu sans relâche l'étroitesse d'esprit dont ils devaient s'affranchir pour déployer leurs talents d'artistes.
Pourtant, la plupart de ces esprits audacieux - même ceux qui dénonçaient l'exploitation du prolétariat, le colonialisme, l'hypocrisie morale et religieuse - ne rompaient guère avec les moeurs codifiées par la société bourgeoise. Les codes de la courtoisie et de l'habillement, les sorties, les divertissements (...). Lorsque certaint s'émancipaient de la "petite" bourgeoisie où ils étaient nés, c'était généralement pour entrer dans la "grande" plus fastueuse et plus tolérante (...).
Le seul discours de la révolte sociale peine donc à saisir la complexité d'un style de vie qui ne tenait pas seulement dans les rapports politiques, mais qui façonnait avec une belle liberté ses décors, ses moeurs, ses loisirs."

"Et, quand le soleil tombait, il me restait encore à confronter ce jeu social aux sensations intemporelles".

Sur Etretat - dernière phrase du livre:
"Tout en accomplissant les dernières brasses qui me rapprochent des bouées, je songe qu'ici - comme dans tout mon pays la France - l'histoire est un peu fatiguée, qu'elle ne joue plus aux avant-postes, comme au temps où quelques artistes avaient fait de ce hameaa de pêcheurs leur villégiature favorite. Planté au plus bel endroit de la côte, l'Etretat d'aujourd'hui a des allures médiocres. Mais derrière ce rivage de bric et de broc, se prolongent des histoires pleines de sous-entendus; et je ne connais rien de plus fascinant que ce mélange de beauté immuable et de transformation du monde."

samedi 7 août 2010

La ronde de nuit - Patrick Modiano

"Les traitres ont toujours le regard clair."

"Du soleil, tombent sur la place de grandes nappes de silence."

"D'un naturel méfiant, j'ai l'habitude de considérer les gens et les choses par leur mauvais côté pour n'être pas pris au dépourvu."

"J'ai éprouvé moi aussi ce qu'on appelle un grand sentiment. Profond. Impérieux. Le seul dont je puisse parler en connaissance de cause et qui m'aurait fait soulever des montagnes: la PEUR."

vendredi 6 août 2010

Dérives sur le Nil - Naguib Mahfouz

"D'une façon générale, le monde gardait son apparence naturelle; mais lorsque le charme du kif mêlé au café noir agirait, les choses changeraient. Des formes abstraites, cubistes, surréalistes ou fauvistes se substitueraient aux eucalyptus, aux acacias et aux plus belles des péniches. L'être humain, quant à lui, retournerait à l'ère des mousses..."

"Il n'y a plus d'histoire drôle depuis que notre vie est devenue elle-même une plaisanterie grotesque."

"Ce dont j'ai encore le plus peur, c'est que Dieu se lasse de nous!"

"-Vous vous désintéressez vraiment de ce qui se passe autour de vous ?
-Nous l'utilisons parfois comme matière à plaisanterie!"

"Comme la plupart des gens que je rencontre dans les soirées mondaines, il arbore un vernis de culture en même temps que des sentiments creux et chancelants, puant la misère et la décomposition."

"La terre attend sans impatience que nos espoirs et nos joies viennent fertiliser son sol."