mardi 29 novembre 2011

Eléctrico W - Hervé Le Tellier

Lu à Paris - Novembre 2011

1% de la rentrée littéraire (7/7)

(trop bien ! Je veux TOUT lire de cet auteur.)

"C'était les années soixante-dix, la fin calamiteuse de l'Estado novo, des années de la dictature de Salazar, un Portugal rural aujourd'hui oublié, salazariste, catholique et analphabète. La télévision interviewait avec un immense respect soeur Marie des douleurs qui soufflait ses soixante bougies au carmel, parce qu'elle avait été Lucia Dos Santos, l'une des trois enfants voyants de Fatima à qui par six fois, en 1917, la Sainte Vierge était apparue. Oui, c'était le temps des trois F, Fatima, fado, football. "

Lire les Contos Aquosos de Jaime Montestrela:
"Sur l'île de Tahiroha, le jour du Vendredi Saint, les cannibales convertis au christianisme ne mangent que des marins."

"J'allais livrer un dernier combat avec cette habileté rageuse des perdants, de ceux qui sont tant allés de défaite en défaite qu'il leur est même devenu indifférent de gagner. La philosophie désespérée des laids, des vieux, des pauvres."

"Mon nom aussi est juif, c'est Oliveira. Et mon deuxième prénom c'est Judite. Mais je suis baptisée. C'est compliqué les dieux."

"J'ai trente ans. Et toi? Tais-toi, ne réponds pas, surtout, imbécile... Dire son âge, ça fait vieillir."

"Je n'aime pas les garçons myopes. Ils donnent l'impression qu'on doit les protéger, et le matin, quand ils se réveillent , on est toujours moins importante que leurs lunettes."

"N'en dis pas plus. Si tu parles trop, ce ne sera jamais assez."

Et signe. Lisiblement. Sans impatience. Comme à regret.

"Les trop belles femmes ne m'attirent pas, à cause de ce refus de séduire qu'elles affichent, de cette hostilité froide qui suinte d'elles, qui leur évite d'être trop souvent importunées."

"Jamais je n'aurais osé jalousé Antonio pour la tendresse qu'elle lui portait, car elle détenait le secret de l'infinie pudeur, elle savait se montrer désirable à lui seul."

"Ce devait être du Mozart. Le premier concert d'un enfant, c'est toujours du Mozart. J'ai dû avoir droit à l'inévitable: "A ton âge, le petit Wolfgang avait composé sa première symphonie" qui peut convaincre les plus endurcis que leur vie est déjà perdue."

"Rien ne me pousse à écrire, aucune marée de phrase ne me chahute. Il y a tant de vanité là-dedans que je n'écris que pour me croire digne de mon propre respect."

"Vieira avait beaucoup de goût. Mauvais, mais beaucoup, comme disait je ne sais plus qui."

"Je n'ai rien caché, rien embelli, pas noirci non plus, ni cherché à noyer dans un humour malvenu les épisodes les moins glorieux. (...) La sincérité de mes confidences m'a apaisé."

"Le peuple de l'archipel d'Adjiji est persuadé que Dieu, qu'ils appellent Niaka, est très méchant et que le Diable, qu'ils nomment Puku, est bon. Ils suivent les règles morales édictées par les prophètes de Puku, qui les exhortent à renoncer à Niaka. Cela ne change finalement pas grand chose."

"J'ai eu envie de rappeler Paul, de lui dire ce que pouvait être une famille, ou simplement deux frère. Lui dire l'affection que j'avais pour lui, lui mon petit frère longtemps trop petit pour moi, que j'avais si peu et si mal rencontré, lui dire aussi la peine que j'aurais à perdre avec lui le peu qui me restait de mon enfance. Je ne l'ai pas fait. J'ai pensé lui écrire. Je ne l'ai pas fait non plus."

"Je n'étais pas loin de penser comme Gertrude Stein: If it can be done, why do it? "

"Je vais vous enseigner une vérité qui vous servira peut-être: avoir de la chance avec les femmes, ça n'existe pas. Ce qui existe, c'est deviner qu'une femme vous laisse une chance, et la saisir."

"Il pleure sur ce qui aurait pu être. Elle pleure aussi, mais sur ce qui justement n'aurait pas pu être. Ce ne sont pas les mêmes larmes."

"Je n'ai pas eu de chance avec les femmes, ou pas su la saisir. Disons que je plaisais trop peu à celles qui me plaisaient, et que celles que j'aurais pu séduire étaient trop disposées à l'être pas n'importe qui. Pourtant, j'aurais aimé avoir un enfant. Des enfants."

"Tous les mauvais romans se ressemblent, mais chaque bon roman l'est à sa façon."





lundi 14 novembre 2011

Un roman français - Frédéric Begbeder

Préface par M. Houellebecq:

"J'ai moins aimé ce qui concerne les nuits passées en garde à vue pour consommation de cocaïne sur la voie publique. C'est curieux, j'aurais dû sympathiser, ayant moi-même passé une nuit en prison pour une infraction à peu près aussi conne (avoir fumé une cigarette dans un avion) - et, je confirme, les conditions de détention, ce n'est pas tout à fait ça. Mais l'auteur et son ami le poète sont un peu revendicatifs, grandes gueules."

"Dans cet épisode délinquant, quelque chose ne va pas. L'enfant ne se reconnaît pas dans l'adulte qu'il est devenu. Et, là aussi c'est probablement la vérité: l'enfant n'est pas le père de l'homme. Il y a l'enfant, il y a l'homme et entre les deux, il n'existe aucun rapport. C'est une conclusion inconfortable, embarrassante: on aimerait qu'au centre de la personnalité il y ait une certaine unité; c'est une idée dont on peine à se détacher; on aimerait pouvoir faire le lien."

********************************

"Mon enfance n'est ni un paradis perdu, ni un traumatisme ancestral. Je l'imagnie plutôt comme une lente période d'obéissance. On a tendance à idéaliser ses débuts mais un enfant est d'abord un paquet que l'on nourit, transporte et couche. En échange du logement et de la nourriture, le paquet se conforme à peu près au réglement intérieur."

"Je ne parlerai pas de moi, pour ne pas me condamner à parler de vous" Mauriac s'adressant à sa famille.

"La famille est une succession de corvée, une meute de personnes qui vous ont connu bien trop tôt, avant que vous ne soyez terminé - et les anciens sont toujours les mieux placés pour savoir que vous ne l'êtes toujours pas.(...) Une vie de famille est une succession de repas dépressifs où chacun répète les mêmes anecdotes humiliantes et automatismes hypocrites, où l'on prend pour un lien ce qui n'est que loterie de la naissance et rites de la vie en commnauté. Une famille, c'est un groupe de gens qui n'arrive pas à communiquer mais s'interrompent très bruyamment, s'exaspèrent mutuellement, comparent les diplômes de leurs enfants comme la décoration de leur maison, et se déchirent l'héritage des parents dont le corps est encore tiède. Je ne comprends pas les gens qui considèrent la famille comme un refuge alors qu'elle ravive les plus profondes paniques. Pour moi, la vie commençait quand on quittait sa famille. Alors seulement, l'on se décidait à naître. Je voyais la vie divisée en deux partie: la première était un esclavage, et l'on employait la seconde à essayer d'oublier la première. S'intéresser à son enfance était un truc de gâteux ou de lâche."

"Avez-vous remarqué que tous les contes de fées se terminent le jour du mariage? Moi aussi je me suis marié à deux reprises, et j'ai éprouvé la même crainte, à chaque fois, pile au moment de dire "oui", cette intuition désagréable que le meilleur était derrière nous."

"On se drogue parce que la vie est assomante, que les gens sont fatigants, qu'il n'y a plus tellement d'idées majeures à défendre, qu'on manque d'entrain." Françoise Sagan

"On peut oublier son passé. Cela ne signifie pas que l'on va s'en remettre."

"Il est possible que j'aie cru être amnésique alors que j'étais juste un parresseux sans imagination. Nabokov et Borges disent, à peu de chose près la même chose: l'imagination est une forme de la mémoire."

"Si j'ai perdu la mémoire à l'âge adulte, c'est peut-être que déjà, très jeune, je n'avais plus confiance en la réalité."

"Depuis je n'ai cessé d'utiliser la lecture comme un moyen de faire disparaître le temps, et l'écriture comme un moyen de la retenir."

"En fuyant ma famille, je ne me rendais pas compte que j'abdiquais face à une aliénation bien pire: la soumission à l'individualisme amnésique. Privé de nos liens familiaux, nous sommes des numéros interchangeables comme les "amis" de Facebook, les demandeurs d'emploi de l'ANPE ou les prisonniers du Dépôt."

"Quand je prias pour les Ethiopiens à la messe de l'école Bossuet, c'était surtout pour ne pas leur ressembler."

"C'est pour cela que j'aime l'autobiographie: il me semble qu'il y a là, enfoie en nous, une aventure qui ne demande qu'à être découverte, et que si l'on arrive à l'extraire de soi, c'est l'histoire le plus étonnante jamais racontée. "Un jour mon père à rencontré ma mère, et puis je suis né, et j'ai vécu ma vie." Waow, c'est un truc de maboul quand on y pense. Le reste du monde n'en a probablement rien à foutre, mais n'est notre conte de fées à nous. Certes, ma vie n'est pas plus intéressante que la vôtre, mais elle ne l'est pas moins. c'est juste une vie, et c'est la seule dont je dispose. Si ce livre a une chance sur un milliard de rendre éternels ma mère, mon père et mon frère, alors il méritait d'être écrit. c'est comme si je planter dans ce bloc de papier une pancarte indiquant: ICI PLUS PERSONNE NE ME QUITTE. Aucun habitant de ce livre ne mourra jamais."


A LIRE:
Les chroniques martiennes et Fahrenheit de Ray Bradbury
Le voyageur imprudent de Barjavel
La sage des Robots d'Asimov
La saga des "Non-A" d'A.E. Van Vogt
Baise-ball à La Baule - San Antonio

mardi 8 novembre 2011

L'abolition de Robert Badinter

"J'étais passé de la conviction intellectuelle à la passion militante."

Au sujet de l'affaire Patrick Henry en 1976 - "Le soir, Roger Gicquel, les plus célèbre des présentateurs, ouvrit le journal de 20 heures sur TF1 par une phrase qui allait connaître la célébrité: "La France a peur". "

"Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement" La Rochefoucauld

"L'accusation dans un cour d'assises, est d'autant plus redoutable qu'elle se montre modérée dans le ton, objective dans l'argumentation, sans passion dans les conclusions. "

"De sa plaidoirie, lorsque l'avocat ne l'a pas écrite pour la lire comme sermon en chaire, de sa plaidoirie lorsqu'elle a jailli comme si un autre s'était substitué à lui et l'emportait là où il ne pensait jamais aller, vers un soleil noir, l'avocat ne conserve que des impressions. Elles se figent ensuite en souvenirs. "

Extrait de la plaidoirie de R. Badinter dans l'affaire Patrick Henry: "Si vous votez comme Monsieur l'Avocat général vous le demande, je vous le dis, le temps passera, c'en sera fini du tumulte, des encouragements, vous demeurerez seul avec votre décision. On abolira la peine de mort, et vous resterez seul avec votre verdict, pour toujours. Et vos enfants sauront que vous avez un jour condamné à mort un jeune homme. Et vous verrez leur regard!"

"peut-être les juges se rappelleraient-ils, à l'heure de la décision, que la postérité finit toujours par juger ceux dont les verdicts font l'histoire"

"Le garde des Sceaux avait rappelé que, pour le gouvernement, la question de la peine de mort n'était pas d'actualité. Pierre Bas et Bernard Stasi décidèrent de recourir à un stratagème qui avait été utilisé naguère avec succès contre la censure théâtrale: pour la faire disparaître, on avait supprimé ses crédits budgétaires. Ils demandèrent donc la suppression du traitement du bourreau."

"Il n'y a rien, dans ma vie professionnelle, que j'ai autant aimé qu'un grand procès d'assises. Parce qu'on connaît les rites, les personnages, la matière du drame, mais qu'on ignore l'essentiel: le dénouement. Parce qu'après travers ces procédures minutieusement réglées, l'imprévisible peut à tout moment surgir. Un témoin dont on attend le pire procure une défense, en livrant un détail jusque-là ignoré, une ouverture inespérée. Un autre, au contraire, dont on espérait qu'il saurait émouvoir les jurés, paralysé par le trac, récite d'un ton monocorde une déposition préparée. Les incidents jalonnent le cours des débats, parfois utiles pour dissiper l'impression laissée par un expert, parfois dangereux quand ils dégénère en querelles de mots avec le ministère public. L'audience, c'est la mer pour l'avocat d'assises: toujours imprévisibles, parfois périlleuse. Ne demandez pas au marin pourquoi il aime l'océan. Il l'aime, voilà tout, c'est sa passion, son élément, sa vie. De même, l'avocat aime l'audience pour les bonheurs qu'elle lui dispense, les épreuves qu'elle lui réserve, et même l'angoisse qu'il ressent quand la fortune judiciaire l'abandonne. L'audience criminelle est pour lui comme le champ clos des tournois, le carré éblouissant du ring, le lieu magique de la souffrance, de la gloire et parfois aussi de la défaite. "

"De cette plaidoirie-là pas plus que des autres je n'ai gardé la mémoire exacte. Seulement des souvenir désarticulés, des impressions, des images qui jaillissent. "

"Pour reprendre l'initiative et regagner la confiance des électeurs de sa majorité, le président de la république et le gouvernement avaient, au printemps 1980, choisi le terrain de la lutte contre l'insécurité. Le thème était porteur. La délinquance, surtout la petite délinquance urbaine s'accroissait, notamment chez les jeunes confrontés à un chômage grandissant. Ces questions avaient été analysées en 1976 dans le rapport du Comité d'étude sur la violence que présidait Alain Peyrefitte. Mais la lutte contre les causes sociales de la délinquance est de longue haleine, ses résultats difficiles à mesurer, son coût financier élevé. En revanche, face à une opinion publique excédée par la violence quotidienne, proclamer sa ferme intention de faire respecter l'ordre et la loi est toujours bien accueilli. Le ministre de l'Intérieur, Michel Poniatowski, avait organisé des opérations de police à grand spectacle, dites "coup de poing", dont l'efficacité laissait sceptiques les responsables policiers. Le garde des Sceaux avait fait préparé un projet de loi intitulé "Sécurité et Liberté". Comme il avait du talent et la majorité de droit se voulait "libérale" face à la gauche "socialo-communiste", il s'attachait à répéter dans tous les médias que "la sécurité est la première des libertés". "

"En six semaines, à l'automne 1980, quatre condamnations à mort furent prononcées. (…) Le plus âgé des quatre condamnés n'avait pas vingt-cinq ans. "

"Un autre facteur, encore mal perçu, contribuait à ce durcissement des verdicts. Jusqu'en 1978, les jurés des cours d'assises faisaient l'objet d'une sélection discrète lors de l'établissement des listes de session par les autorités municipales. Il ne s'agissait pas, comme au 19ème siècle, de composer des jurys de notables soucieux de défendre à tout prix l'ordre et la propriété. Mais les jurés comptaient une forte proportion de membres des professions libérales, de fonctionnaires, de cadres. Dans ces milieux, dont le niveau culturel est supérieur à celui de la moyenne population, le nombre de partisans de l'abolition, et plus généralement d'une modération des peines, était plus élevé. Cette sélection des jurés potentiels faisait l'objet de critiques de la part de ceux qui voulaient que la composition des jurys reflétât celle du peuple français au nom duquel ils jugeaient. Aussi, une loi de 1978, voté à l'unanimité, avait décidé que, dorénavant, les jurés seraient désignés par simple tirage au sort sur les listes électorales. Les principes démocratiques s'en trouvaient mieux respectés. Mais la sévérité accrue des verdicts témoignait de ce que le sentiment populaire n'était nullement porté à la mansuétude envers les criminels, fussent-ils d'origine modeste ou socialement défavorisés. Les sondages indiquaient d'ailleurs que c'était dans les milieux populaires que l'attachement à la peine capital demeurait le plus vif. Les verdicts de l'automne 1980 reflétait ce changement dans la composition des jurys et laissait présager d'autres condamnation à mort. "

"Dans ma conscience, dans la foi de ma conscience, je suis contre la peine de mort. Et je n'ai pas besoin de lire les sondages qui disent le contraire: une opinion majoritaire est pour la peine de mort. Et bien moi, je suis candidat à la présidence de la République… Je dis ce que je pense, ce à quoi je crois, ce à quoi se rattachent ma croyance, mes adhésions spirituelles, mon souci de la civilisation. Je ne suis pas favorable à la peine de mort." François Mitterrand.

"Dans une Assemblée, les parlementaires sont chez eux. Comme ministre, vous êtes leur invité. Ils peuvent vous brocarder, vous attaquer, vous lancer mille flèches. Même transformé en Saint Sébastien, ne vous laissez jamais aller à répondre sur le même ton. Votre meilleure arme, c'est l'ironie. On vous pardonnera tout si vous savez faire rire au détriment de votre adversaire. Mais jamais du colère ni de fureur…" propos prêtés à F. Mitterrand

vendredi 4 novembre 2011

L'art français de la guerre d'Alexis Jenni

Lu en Paris en Novembre 2011

(Prix Goncourt 2011)

** 1% rentrée littéraire 6/7 **

"La télévision donnait des détails, toujours précis, on fouillait les archives au hasard. La télévision sortait des images d'avant, des images neutres qui n'apprenaient rien; on ne savait rien de l'armée irakienne, rien de sa force ni de ses positions, on savait juste qu'elle était la quatrième armée du monde, on le savait parce qu'on le répétait. Les chiffres s'impriment car ils sont clairs, on s'en souvient donc on les croit. Et cela durait, cela durait. On ne voyait pas la fin de tous ces préparatifs."

"Les chiffres traversent le langage sans même s'apercevoir de sa présence; les chiffres laissent coi, bouche ouverte, gorge affolée cherchant l'oxigène dans l'ai raréfié des sphère mathématiques."

"Oh comme le cinéma montre bien les choses! regardez! Regardez comme deux heures montrent bien plus que des jours et des jours de télévision!"

"Ils devenaient de plus en plus futiles, ils devenaient baudruches errantes, ils se propulsaient dans la pièce, sans but, par l'air qui fuyait de leur bouche."

"Le brouillard l'entourait, vaguement luminescent mais sans lui permettre de rien voir, diffusant juste assez de lumière pour lui assurer qu'il ne fermait pas les yeux."

Retour à Killybegs de Sorj Chalandon

Lu à Paris en octobre 2011

(Grand prix du roman de l'Académie Française 2011)

** 1% de la rentrée littéraire 5/7 **

"Je n'ai plus posé de question. Et Danny a gardé les siennes. Lui et moi allions faire la guerre aux Anglais, comme nos pères la faisaient. Et nos grand-pères aussi. Poser des questions, c'était déjà déposer les armes."

"L'impression qu'il y avait toujours un jugement derrière les rideau. Les Britanniques surveillaient nos gestes, l'IRA surveillaient notre pensée, les parents surveillaient notre enfance et les fenêtres surveillaient nos amours. Rien ne nous cachait jamais."

"En suivant Barabbas, tu condamnes Jésus."

"J'étais écoeuré d'amour."

"C'était ça. Un salaud est peut-être un chic type qui a baissé les bras."

"Il a voulu me répondre. Murmurer un mot qui abîme le silence."

Tout, tout de suite de Morgan Sportès

Lu en Octobre 2011 à Paris

** 1% de la rentrée littéraire 4/7 **

Rien ne s'oppose à la nuit de Delphine de Vigan

Lu à Paris en Octobre 2011

** 1% de la rentrée littéraire 3/7 **

Le système Victoria d'Eric Reinhardt

Lu en Septembre 2011 à Paris

** 1% rentrée Littéraire 2/7 **

"-En même temps je pense que c'est un moyen de se disculper à con compte, ce sont des larmes à l'américaine, c'est l'émotion immédiate, naturelle, à laquelle tout le monde cède. Après avoir pleuré sur le sort des ouvriers, on a bonne conscience... on repart de l'avant et on continue à détruire.
- Tu es horrible de me dire ça, tu me vois donc comme un monstre?
- Non, je ne te vois pas comme un monstre. Mais je trouve ça encore pire de pleurer après l'avoir fait. Il aurait été plus décent que tu te dispenses de tomber dans l'émotion facile."

"Tel était le système qui fondait l'existence de Victoria: ne jamais être à la même place, se segmenter dans un grand nombre d'activités et de projets, pour ne jamais se laisser enfermer dans aucune vérité - mais peut-être être soi-même, dans le mouvement, dans sa propre vérité. Victoria n'éprouvait pas de pitié, de remords, de tristesse ou d'angoisses, car elle les dissolvait par le mouvement et la fragmentation. C'est la vitesse la vérité de notre monde, et pas les situations locales qu'elle permet aux puissants de survoler, de traverser ou d'entreapercevoir. Victoria était partout chez elle, n'était contrainte nulle part, disposait d'une échappatoire en toute circonstance."

"Personne ne peut dire qui a raison, toi ou les syndicats, ni où se trouve la vérité de ce combat qui vous a opposés. Est-ce que tu les as trompés pour leur bien? Est-ce qu'ils se trompent eux-mêmes en refusant d'évoluer? Ou au contraire, vous les avez vraiment baisés, et ils se préparent à vivre des moments difficiles? Qui a raison, et qui a tort? Personne, peut-être... eut-être que cette question n'a plus lieu d'être, qu'il ne faut plus se demander si les gens ont raison, ou s'ils ont tort, de faire ce qu'ils font, de croire ce qu'ils croient. Peut-être que le nombre de situations où il sera absurde de vouloir déterminer qui a raison, ou qui a tort, va aller en augmentant... C'est ça peut-être la définition de notre monde libéral, et c'est pourquoi tu l'incarnes si bien... Je suis sans doute un peu fatigué mais j'ai l'impression de ne plus rien comprendre... de ne plus savoir quoi penser des choses qui  relèvent du social, de la politique et de l'économie. Là, maintenant, je n'arrive pas à savoir si tu es horrible ou merveilleuse, atroce ou bien sublime."

Le ravissement de Britney Spears de Jean Rolin

Lu à Paris en septembre 2011

** 1% rentrée littéraire 1/7 **

"En repassant devant le strip tease, je me rappelai que cela faisait longtemps que je n'avais pas eu d'activité sexuelle et je me promis d'y remédier prochainement."

"Il arrive cependant que Lindsay, qui n'est tout de même agée que de vingt-quatre ans, s'efforce de renouer avec cette image de jeune femme douce, et dénuée de pose, dont se souviennent ceux qui l'ont connue autrefois. Par exemple en militant - ponctuellement - contre l'exploitation des enfants dans des usines indiennes. Ou, plus humblement, en conviant des paparazzis à la filmer dans l'exercice d'activités innocentes et banales (bien qu'éventuellement rémunérées), telles que la préparation de milk-shakes: tant il est vrai que la crème glacée est décidément l'une des espèces sous lesquelles les stars communient le plus volontiers avec leur public. La mise en ligne de la vidéo montrant Lindsay, de concert avec sa petite soeur Ali, l'une et l'autre vétûes de longs tabliers noirs, et les mains gantées de matière plastique translucide, en train de préparer des milk-shakes (...) La scène, filmée par des dizaines de paparazzis -il s'agit clairement d'un set-up -, se déroule dans la boutique Millions of Milkshakes située sur Santa Monica presque en face du Santa Palm Car Wash (...).La boutique fait partie d'une chaîne appartenant à un jeune entrepreneur britannique d'origine pakistanaise, Sheeraz Hasan, qui, parmi d'autres grands desseins, prétend vouloir réconcilier l'islam et l'Amérique, par des voies - le commerce de milk-shakes étant l'une des moindres - dont il est douteux qu'elles recueillent l'adhésion de eaucoup de fidèles du premier. Quant aux efforts que déploient Lindsay pour paraître normale, et gentille - une grande soeur attentive consommant des produits lactés- il en faudrait beaucoup plus pour désarmer la malveillance de la presse spécialisée. Le jour même où cette vidéo est mise en ligne, tel ou tel site se fait écho d'une rumeur selon laquelle, à l'âge de dix-sept ans, elle se serait envoyée en l'air avec un certain Tommy Motola, ce qui -ne me demandez pas pourquoi- serait de nature à nuire gravement à sa réputation. (...) La plupart du temps, ces informations sont présentées au conditionnel, voire aussitôt démenties, mais le rythme auquel elles se succèdent n'en réussit pas moins à donner de Lindsay l'image d'une épave - train wreck- vindicative et rabrouée, titubant sous l'emprise de toxiques divers, dont la chute imminente est guettée jour après jour avec des transports de volupté."

"Comme il est de règle mon amour naissant pour Wendy, imprimait une certaine souplesse, voire une certaine laxité, à mes jugements moraux habituellement plus abrupts."

"Mais un autre jeu, proposé par Hollywoodgossip, abonde également dans le sens de Serge: à la question "Où aimeriez-vous voir Lindsay Lohan?" seul 8% des 2312 votants (le lundi 24 mai 2010 à 17 heures) avaient répondu "dans mes bras", parmi les quatre réponses possibles, contre 16% qui souhaitaient l'envoyer dans un "trou à crack" (local crack den), 24% en cure de désintoxication et 50% en prison. (De ce qui précède, il ressort également que 2% des votants s'étaient refusés à choisir entre les quatre options proposées.) De mon coté, j'ai répondu (électroniquement) "dans mes bras", et je dois porter au crédit de Hollywoodgossip que mon vote a été immédiatement pris en compte."

"La discussion entre Shotemur et les garde-frontières s'envenime parfois, mais les Tadjiks sont assez enclis à vociférer, pour le plus léger désaccord, sans que ces éclats de voix tirent à conséquence ou témoignent nécessairement de position inconciliables."

"On peut penser tout le mal qu'on veut des Etats-Unis: mais il semble que nulle part ailleurs, dans le monde, on ne rencontrera dans un bar autant de gens différent - des hommes et des femmes, des jeunes et des vieux, des beaux et des moches, des gringalets et des colosses, des Noirs et des Blancs, des anglophones et des hispanophones, des militaires et des civils - communiant dans un tel climat d'innocence, si difficile que puisse être la définition de cette qualité, ou de cet état d'esprit. Ce soir-là, j'avais été frappé, notamment, par l'extraordinaire indulgence, et le feint enthousiasme, avec lesquels le public avait accueilli une pâle imitation de Janis Joplin, en karaoké, à laquelle s'était livrée une jeune femme obèse édentée."