vendredi 4 novembre 2011

Le système Victoria d'Eric Reinhardt

Lu en Septembre 2011 à Paris

** 1% rentrée Littéraire 2/7 **

"-En même temps je pense que c'est un moyen de se disculper à con compte, ce sont des larmes à l'américaine, c'est l'émotion immédiate, naturelle, à laquelle tout le monde cède. Après avoir pleuré sur le sort des ouvriers, on a bonne conscience... on repart de l'avant et on continue à détruire.
- Tu es horrible de me dire ça, tu me vois donc comme un monstre?
- Non, je ne te vois pas comme un monstre. Mais je trouve ça encore pire de pleurer après l'avoir fait. Il aurait été plus décent que tu te dispenses de tomber dans l'émotion facile."

"Tel était le système qui fondait l'existence de Victoria: ne jamais être à la même place, se segmenter dans un grand nombre d'activités et de projets, pour ne jamais se laisser enfermer dans aucune vérité - mais peut-être être soi-même, dans le mouvement, dans sa propre vérité. Victoria n'éprouvait pas de pitié, de remords, de tristesse ou d'angoisses, car elle les dissolvait par le mouvement et la fragmentation. C'est la vitesse la vérité de notre monde, et pas les situations locales qu'elle permet aux puissants de survoler, de traverser ou d'entreapercevoir. Victoria était partout chez elle, n'était contrainte nulle part, disposait d'une échappatoire en toute circonstance."

"Personne ne peut dire qui a raison, toi ou les syndicats, ni où se trouve la vérité de ce combat qui vous a opposés. Est-ce que tu les as trompés pour leur bien? Est-ce qu'ils se trompent eux-mêmes en refusant d'évoluer? Ou au contraire, vous les avez vraiment baisés, et ils se préparent à vivre des moments difficiles? Qui a raison, et qui a tort? Personne, peut-être... eut-être que cette question n'a plus lieu d'être, qu'il ne faut plus se demander si les gens ont raison, ou s'ils ont tort, de faire ce qu'ils font, de croire ce qu'ils croient. Peut-être que le nombre de situations où il sera absurde de vouloir déterminer qui a raison, ou qui a tort, va aller en augmentant... C'est ça peut-être la définition de notre monde libéral, et c'est pourquoi tu l'incarnes si bien... Je suis sans doute un peu fatigué mais j'ai l'impression de ne plus rien comprendre... de ne plus savoir quoi penser des choses qui  relèvent du social, de la politique et de l'économie. Là, maintenant, je n'arrive pas à savoir si tu es horrible ou merveilleuse, atroce ou bien sublime."

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